
Pendant la Guerre froide, des scientifiques – très sensibles à la cause animale, naturellement – ont entrepris de dresser des cétacés en vue de réaliser des missions d’espionnage. Le conflit en Ukraine aurait remis cette pratique, si l’on s’en réfère au chapitre « Les dauphins, espions et saboteurs » de Jean-Baptiste Pattier et Emmanuel Chaunu dans Les Animaux Héros de l’Histoire. Et à la mention « équipement Saint-Pétersbourg » figurant sur le harnais d’un béluga trouvé au large des côtes de Norvège.
Et si, le 20 janvier 2025, la Chine s’était emparée de cette pratique ? Une histoire de baleine… bleue… navigant… sur les smartphones, vous visualisez ? Je veux naturellement parler de DeepSeek.
A cette date, Pierre était en train de finaliser son papier sur l’intérêt des actifs obsolètes.
Amusant de voir en parallèle, dans l’actualité, une autre forme de stratégie normative basée sur l’utilisation des actifs immatériels : la mise à disposition gratuite du modèle DeepSeek, pour « casser » la suprématie – au moins en termes de communication – de ChatGPT.
Pour triompher, la jeune pousse de l’Empire du Milieu se lance avec un bon argument pour tout le monde : un petit coup de greenwashing pour réconcilier les écoanxieux avec l’IA ; pour les cyberparanos, une touche d’open source ; pour les économes, un moindre coût ; pour les technophiles, un modèle plus performant. J’en oublie sûrement.
La baleine bleue déferle alors sur le monde.
Et quinze jours plus tard… Seulement deux petites semaines après… Ce n’est plus la Chine, qui s’éveille, mais le reste du monde.
Les Etats réalisent alors que plutôt que de piocher dans ses 5 000 ans d’histoire, cette entreprise chinoise a préféré piocher dans l’histoire grecque et emprunter à Epéios son fameux cheval. L’ambition étant sans commune mesure, elle s’est toutefois plutôt orientée vers le plus gros mammifère marin vivant : la baleine bleue. Car in fine, l’application mobile ouvre nos données et même nos pensées et préoccupations à une startup, dans l’ombre de laquelle s’amuse le PCC (DeepSeek : derrière l’IA générative, l’ombre du parti chinois, Libération, 29 janvier 2025).
La résistance… ne s’organise pas. Certains pays restent sur le banc de touche. L’Italie dégaine à nouveau le RGPD… Plaisanterie éculée en dehors de l’UE. D’autres viennent interdire l’application – mesure dont tout aficionado de série US vous dira qu’elle ne résiste pas à un bon VPN – et l’Amérique réclame 20 ans de prison et 1 000 000 de dollars d’amende pour tout utilisateur. L’effet de la sarisse, tu disais, Pierre ?
La guerre n’est peut-être pas perdue. Mais une chose est certaine : à l’heure où la Commission européenne finalisait la liste des pratiques d’IA interdites, Cathay gagnait une bataille vis-à-vis de l’UE et des Etats-Unis !